« Allez hop, mamie ! ont dit les extraterrestres, Monte dans le vaisseau spatial. » La vieille dame prélevée au centre commercial eut l’air étonnée, puis ravie, puis un éclair de pure horreur passa sur son visage. « Est-ce que quelqu’un vous a donné mon nom ? », demanda-t-elle. « Racontez-nous à quoi ressemble votre planète », dirent les extraterrestres, souriantes. Alors la vieille dame soupira, s’assit dans la soucoupe, détacha ses sandales et commença :
« Je vends des noix de bétel devant le supermarché. Quand j’ai envie d’un remontant, je vais voir Libero à Station Dwich, pour un p’tit café. Je montre mon pass, pour m’asseoir, c’est à cause de mes pieds… »
« Quel rapport entre le café et ce que vous appelez le pass ? C’est une sorte d’échange, une monnaie ? »
« Non, c’est le pass, c’est le papier qu’ils donnent après l’injection, le motif carré… on le lit avec une machine… »
« Sur votre planète, des machines lisent les injections ? Et Libero ? »
« Libero, c’est mon cafetier de Station Dwich. Le pass, il le lit pas pour son plaisir, il me demande toujours au passage des nouvelles de mes petits-enfants… puis j’ai voulu aller au cinéma après la journée… oh, je crois que je me suis trompée de cinéma. À l’entrée c’était pas Leftaris, le guichetier que je connais, lui aussi me demande des nouvelles, non, c’était une autre, et là, plus de pass ! J’ai voulu dire que je l’avais oublié chez Libero, peut-être, mais on m’a demandé où c’était et là, il semblait que personne ne connaissait Station Dwich ! Alors tout le monde s’en est mêlé… la guichetière a dit : “Il est où le pass ?” et elle a grommelé qu’elle était pas payée des cacahuètes pour embêter les mamies et elle a appelé le gérant qui a dit “Il est où le pass ?”, mais il était aussi vieux que moi et ne savait pas lire les codes carrés et il a appelé la directrice qui a dit : “Il est où votre satané pass ?” En moins de deux, y’avait toute une petite foule. »
« Mais nous avions compris que sur votre planète, c’était un groupe appelé la police qui demandait les papiers ?»
« Mais les papiers ont changé, comment vous expliquer ? Ils se sont multipliés depuis la pandémie… et la police aussi s’est multipliée, mais elle est habillée comme vous et moi, elle se cache dans le cafetier, dans la guichetière… enfin, elle n’est pas vraiment habillée comme vous, avec vos drôles de carapaces noires. »
« Mais ce pass, Madame, il est où ? »
« Vous êtes de la police ? Je ne vous avais pas reconnues, avec ces carapaces noires. Vous étiez pas bleues avant ? »