Dossiers

Le flouze complet

L’argent n’est pas une masse informe, autonome, qui obéirait à sa propre rationalité. Moyen d’échange, mais aussi support de morale, il a une odeur : tout argent ne se vaut pas. Nous passons notre temps à tracer et déplacer les frontières entre des usages justes et injustes selon des normes toute personnelles, qui s’entrechoquent bien sûr avec de plus larges systèmes de jugement. Nos rapports au fric sont modelés par la rencontre permanente, et à bas bruit, entre des pratiques sociales, des représentations morales, une sphère économique qui se financiarise de plus en plus, et des politiques publiques. Quels enjeux politiques y a-t-il donc à échanger collectivement ou ouvertement sur les diverses significations et usages de l’argent ? À s’engueuler sur le sujet ? À observer finement la manière dont les rapports à l’argent de certain·es sont dominés, éduqués, orientés ? À regarder quel récit politique nous est proposé à travers la lecture d’un budget ? Bienvenu·es dans le Flouze complet, anti-manuel de la pudeur pécuniaire.

Dossier illustré par Marion Jdanoff.

L’esprit vieille

La vieillesse est politique : investie de représentations, identifiée comme un marché juteux, prise en charge par des institutions, objet de discours présidentiels lénifiants pendant la crise sanitaire. D’où l’envie de s’en saisir comme d’une chance de métamorphose, un « bel âge pour la révolte » (J. Rennes), ou plus simplement comme une trêve, une saison hors de portée des oppressions domestiques, un « Printemps des veuves » comme aubaine. Construire le dossier pendant la pandémie, ça voulait dire se décaler un brin pour mieux y voir, assurer l’aller-retour de elleux à nous, de l’intime au politique, du féminisme à l’âgisme.

Par amitié, par amour, par obligation morale ou administrative, parce que « c’est comme ça que ça se passe dans le métier », nombreuses sont les situations dans lesquelles, volontiers ou malgré nous, on trime sans que cela ne soit vu. Elles ne sont pas toujours problématiques mais le deviennent lorsqu’un véritable déni dissimule la reproduction d’inégalités et l’exploitation d’une main-d’œuvre gratuite ou bon marché, vulnérable ou jugée indigne de s’autodéterminer. Ce dossier part à la rencontre de celles et ceux dont le quotidien est marqué par le déni de travail. Comment survient ce déni ? Comment lutter contre ? Et que risque-t-on si la lutte implique l’extension du périmètre de la catégorie « travail » ?

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La question militaire, la politique énergétique d'un pays, l'aménagement public-privé du territoire sont réputés affaires complexes et sérieuses. Qu'y entendent les non expert·es et les non élu·es, à fortiori "les bonnes femmes" censées se concentrer sur la reproduction et le soin de la vie humaine ? Ces cinquante dernières années, certaines ont pourtant précisément puisé dans cette responsabilité pour s'opposer à une modernité destructrice, quand d'autres mettaient les pieds dans le plat sans se soucier de l'étiquette. Contre la catastrophe qui vient, contre celles déjà survenues, elles ont lutté et luttent encore en occupant, chantant, dansant, brodant ou en sabotant...

 La famille type, en Occident du moins, est aujourd'hui largement définie par la filiation biologique et surtout par un recentrement parents-enfants. Rien de spontané ni de naturel là-dedans. De gros efforts ont été et restent nécessaires pour encourager au repli nucléaire, désormais fondement de la vie privée, de l'organisation sociale et des théories politiques conservatrices. C'est sur ces efforts que Panthère Première se penche lors d'un dimanche bien particulier. Comment l'État encourage-t-il la famille et dessine-t-il ses contours ? Qui travaille à créer des liens ? Quelles sont les opérations qui la fabriquent et, partant, quels sont les points où elle se défait ?

Illustrations de Diane Étienne (gravures sur bois)

Les archives qui nous intéressent ici gardent trace de la vie de personnes ou de groupes qui en laissent souvent peu dans les fonds d'archives publiques en raison de leur inintérêt supposé ou de leur fragilité. Comment lutter contre l'oubli ? Comment se réapproprier les codes de la conservation et de la mise en valeur des archives ? Comment constituer un lieu actif, vivant et horizontal où l'archive est une ressource pour la suite ? Panthère Première se penche de le travail de quelques archivistes hétérodoxes...

Dilapider son patrimoine, le transmettre à sa progéniture, le partager ? Les options sont plus nombreuses que ne le laissent penser les statistiques, le droit français et les bonnes manières. Sur les pavés, une nouvelle page : en se frottant à La pierre à feu, la revue Panthère Première explore les histoires de patrimoine et de transmission, qui suscitent et perpétuent des inégalités, mais les fait aussi parfois partir en fumée quand la pierre réchauffe les collectifs dont elle s’entoure et entretient la foudre de la lutte.

Panthère Première s’installe à la lisière des dits conformes et des voix légitimes, à l’écoute des paroles qui dérangent et résistent, attentive aux manières de contraindre, de pousser des individus à conformer leurs discours, d’étouffer les bricolages malvenus. Quiproclash ! Ou comment les dissonances du langage révèlent avec force rapports de pouvoir et rigueur des institutions.